Des lois qui musèlent le monde du travail et fragilisent les services publics
Dans la région de Lanaudière, la Fédération interprofessionnelle du Québec (FIQ), la Confédération des syndicats nationaux (CSN), l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS) et l’Association des médecins omnipraticiens Laurentides-Lanaudière dénoncent vivement l’attitude du gouvernement Legault, qui multiplie les projets de loi restreignant les droits fondamentaux des travailleurs et professionnels du réseau et fragilisant l’accès aux soins pour la population.
En quelques mois à peine, le gouvernement a présenté ou adopté une série de projets de loi qui modifient profondément l’équilibre des relations de travail au Québec :
- La loi 2, qui impose unilatéralement de nouvelles obligations aux médecins, lie une partie de leur rémunération à des indicateurs hors de leur contrôle, réduit leur autonomie professionnelle, en plus de leur droit d’association et de leur droit à la négociation tout en instaurant un système de surveillance à quatre niveaux des médecins, avec pénalités, dont certaines toucheront aussi la population ;
- La loi 89, qui donne au ministre et au Tribunal administratif du travail le pouvoir de suspendre une grève ou d’imposer des services essentiels, limitant concrètement le droit de grève, et qui propose de rendre une partie des cotisations syndicales facultatives, une attaque contre la formule Rand, un pilier du financement syndical, qui vise à affaiblir la voix collective des salariés ;
- La loi 100, qui centralise la négociation dans l’ensemble du secteur public et retire aux équipes locales leur capacité d’adapter les conditions de travail aux réalités du terrain ;
- La loi 15, qui fait de Santé Québec un employeur unique, prive les travailleurs de leviers de discussion directe.
Aux yeux des organisations, ces gestes ne sont pas isolés : ils s’inscrivent dans une stratégie qui fragilise les syndicats, contournent la négociation et imposent des conditions de travail par voie législative plutôt que par le dialogue.
« Le gouvernement souhaite rendre plus efficace le réseau de la Santé et améliorer l’accès aux soins, mais il étouffe le dialogue et musèle ceux qui le font fonctionner. Moderniser le réseau, ça ne se fait pas en solo dans un cabinet de ministre. Il faut impliquer les gens du terrain, sans quoi le projet de la CAQ est voué à l’échec ! », dénonce Simon Deschênes, président du STT du CISSS de Lanaudière-CSN.
Pour l’Association des médecins omnipraticiens Laurentides–Lanaudière (AMOLL), la loi 2, adoptée sous bâillon le 25 octobre, met en péril l’accès aux soins et risque de créer un précédent historique au Québec. En plus d’imposer des contraintes irréalistes aux médecins de famille, cette loi porte aussi atteinte à certains principes fondamentaux protégés par la Charte canadienne des droits et libertés, notamment la liberté d’association et la liberté professionnelle. Des mesures qui vont à l’encontre des valeurs démocratiques et du dialogue qui devrait guider toute réforme touchant un droit aussi essentiel que celui de la santé. « Cette loi menace directement notre capacité à offrir des soins accessibles et humains. Elle illustre une dérive gouvernementale inquiétante où les décisions sont centralisées et imposées sans dialogue, au détriment de la réalité du terrain et des besoins des patients. On demande aux médecins de famille de faire toujours plus avec toujours moins, sans tenir compte du manque de ressources. Nous voulons du changement, mais nous refusons qu’il se fasse au prix du respect, de la collaboration, des droits des individus et de l’accès aux soins pour les patients », précise Dre Lyne Couture, médecin de famille et présidente de l’AMOLL.
« Il n’est pas question de rester les bras croisés pendant que le gouvernement tente d’affaiblir les droits des personnes syndiquées, surtout quand on sait que, dans le domaine de la santé et des services sociaux, ce sont souvent elles qui montent aux barricades pour protéger les usagers et les usagères ! », soutient Valérie Lepage, représentante nationale de l’APTS dans Lanaudière.
« Les lois 2, 15, 89, et 100, c’est une attaque frontale contre les professionnelles en soins et contre le réseau public. Ces lois centralisent le pouvoir entre les mains du gouvernement, musèlent les travailleuses, affaiblissent les syndicats et ouvrent grand la porte à la privatisation. Quand on affaiblit les moyens des syndicats, on affaiblit la voix des membres. Quand les membres n’ont plus de voix, c’est une porte grande ouverte pour que le gouvernement nous impose ce qu’il veut quand il le veut. C’est une offensive déguisée en réforme “administrative” », dénonce Claude Lavallée, Présidente de la FIQ-SIL.
Des conséquences bien réelles pour la population
Les mesures imposées par le gouvernement touchent directement l’accès aux soins et la qualité des services. Quand on retire aux équipes leur autonomie et leur capacité d’adapter leur travail, on ralentit les soins, alourdit la bureaucratie et décourage le personnel déjà à bout de souffle. Ce ne sont pas seulement les droits des travailleurs qui sont attaqués, ce sont ceux de la population.
Le droit de s’associer, de négocier et d’être entendu, c’est ce qui permet d’offrir des soins humains, accessibles, de qualité et adaptés aux réalités locales. Dans cet esprit, la FIQ, la CSN, l’APTS et l’AMOLL interpellent les instances régionales afin que soit défendue la voix des patients.
Ensemble, ces organisations refusent de laisser un gouvernement affaiblir les valeurs d’entraide qui unissent les Québécoises et les Québécois. Leurs membres, tout comme la population, méritent mieux que des pressions et des reculs. En ce sens, elles continueront d’œuvrer pour défendre la qualité des services publics et rappeler toute l’importance d’un système de santé universel, efficace et gratuit. Parce qu’une société juste et solidaire, ça se protège.
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